Avez-vous le flow, comme Sharma ?

flow Sharma préparation mentale
Chris Sharma est de retour aux affaires. Après sa récente libération de El Bon Combat, 9b+, à la Cova de Ocell, près de Barcelone, il a déclaré : “Après des tonnes d’efforts et tant d’essais où il s’en était fallu d’un cheveu, tout s’est assemblé aujourd’hui. Vraiment euphorique et excité de renouer avec le flow”. Qu’est-ce que ce flow et comment créer les conditions de sa survenue ? Éclaircissements.

Élaboré par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi, le concept de flow désigne un état maximal de concentration, une expérience optimale au cours de laquelle une personne est totalement engagée dans ce qu’elle fait et la réalise avec fluidité, sans effort apparent. En découle un sentiment d’euphorie et de réussite, d’immersion totale dans l’instant présent (d’où le terme de flow, littéralement en anglais flux).

Ce concept trouve ses applications aussi bien dans le domaine du sport que dans celui de la création artistique ou de la spiritualité. Il se caractérise notamment par un haut degré de concentration (hyperfocalisation) et une sensation de contrôle total de soi et de l’environnement, avec distorsion de la notion de temps. On parle souvent d’“état de grâce” à son propos, ou d“état de conscience modifié”.

Les conditions d’apparition du flow

Relativement impalpables, les conditions d’émergence du flow ont été étudiées en psychologie par les chercheurs Csikszentmihalyi, Voelkl et Ellis, Demontrond et Gaudreau. Les travaux de Timothy Gallwey se sont concentrés sur le “jeu intérieur” requis pour performer dans des sports tels que le golf et le tennis. Il en ressort que le flow est plus facilement atteint par des sportifs se fixant des objectifs extrêmement pointus et capables de feedback clairs sur leurs propres performances.

Paradoxalement l’équilibre entre les compétences de l’individu et le défi à relever est sans doute une condition moins importante pour atteindre le flow que sa capacité à fondre sa conscience dans l’action et sa motivation à vouloir vivre une expérience autotélique (une expérience agréable et enrichissante qui survient lorsque l’organisme fonctionne au maximum de ses capacités).

Sharma et son expérience du flow

Pour en revenir à Sharma, voici 3 leçons que nous pouvons tirer de son expérience pour se placer en état de “flow” et générer des conditions conduisant à la performance :

1. Notre attitude détermine ce que nous allons devenir
Tout est bien souvent question de perspective. La manière dont nous envisageons les choses, notre interprétation des événements, la perspective selon laquelle nous choisissons de les vivre influe sur notre comportement. La vie nous jette sans cesse des défis : on peut les regarder comme des difficultés insurmontables ou au contraire réfléchir aux solutions.

Le plaisir de se confronter positivement à la complexité fait naître le flow. Notre esprit a parfois tendance à se fabriquer des problèmes. Les envisager sous forme de défi ouvre la voie de l’exploration, plutôt que celle de la peur. C’est d’ailleurs ce que dit Sharma : “Quelle est la prochaine étape ? Où allons-nous aller maintenant ? Eh bien, si nous restons dans une attitude d’ouverture, la vie nous montre le chemin.”

Manière ésotérique de verbaliser des phénomènes que les scientifiques ont étudié et défini sous les termes de “neuroplasticité du cerveau”, c’est-à-dire le processus dynamique par lequel le cerveau est capable de créer, défaire ou réorganiser les réseaux de neurones et leurs connexions, pour s’adapter à des situations nouvelles.

2. La conscience du moment présent
L’escalade peut produire des états de tension importants, notamment en situation de compétition, où l’on attend des grimpeurs qu’ils produisent une performance exceptionnelle. C’est aussi parfois le cas en falaise lors d’une tentative, à vue ou après travail, quand les grimpeurs se mettent, comme on dit, un peu trop “la pression”. Stress, peur de l’échec, peur de décevoir, peur de se décevoir…

Tous ces sentiments négatifs sont bien sûr néfastes à la performance car ils détournent l’attention des exigences du moment. Nous nous projetons dans les conséquences hypothétiques de l’action, nous nous jugeons par anticipation alors que rien n’est encore joué ! Au lieu d’être à 100% focalisé sur l’action, sur toutes les micro-tâches à réaliser, l’esprit panique et se retrouve comme paralysé. Une des clefs pour être dans le flow est de donc revenir à la conscience de l’instant présent et de se concentrer sur ce qu’on a à faire, sans expectative de résultats.

3. Sortir de la zone de confort
La routine est très confortable mais insidieusement, elle fait naître le doute et la peur. Dès qu’il y a un tout petit changement, on est perturbé, cela prend des proportions énormes, on ne sait plus s’adapter. Accepter de sortir de sa zone de confort signifie au contraire jouer avec l’aléa, vivre des situations certes plus aventureuses mais aussi plus stimulantes.

Là encore, l’expérience de Sharma est parlante : “Deux ans après la Dura Dura, il était temps de s’immerger dans quelque chose de nouveau. Quand un ami m’a parlé de ce projet, j’ai réalisé de quoi ma vie était faite depuis si longtemps, des lignes qui s’emparent de votre imagination et vous inspirent pour élever votre niveau d’un cran, des King lines : quelque chose de parfait, créé par la Nature, qui demande qu’on s’y consacre à 200%. J’essaie cette voie depuis le mois de juin et elle a réveillé en moi la passion et l’envie de repousser mes limites.

Pour aller plus loin

A807

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4 réponses

  1. Jerome dit :

    Joli article motivant… 😉

  2. Laurent dit :

    En ce qui me concerne il me semble que l’état de flow est plus lié au danger (réel ou supposé) qu’à des objectifs pointus. J’ai souvent ressenti le flow en escalade, mais encore plus en BASE. Beaucoup moins dans d’autres sports moins connotés adrénaline.

    L’aspect temporel est majeur : la distortion du temps effectivement mais aussi l’impression de ne pouvoir être que dans l’état présent (ressources accaparées par l’instant présent uniquement)

    Cet état peut être pour certains une quête en soi qui dépasse la pratique à laquelle il est lié. On parle beaucoup d’addiction à l’adrénaline, je pencherais plutôt pour une addiction au flow.

    • Matth dit :

      A mon sens l’adrénaline et le flow sont deux choses bien distinctes, bien que l’on puisse y trouver de vrais similitudes. En effet dans ses deux cas le temps n’est plus vraiment le même et notre états de conscience est modifier.
      Mais dans l’adrénaline, comme tu le dit si bien, il y a la notion de danger qui nous mais dans cette état de « transe » dirons nous. Le danger (réel ou suggéré) est le stimuli qui fait réagir notre corps. Le rythme cardiaque accélère etc …
      A l’inverse le flow est plus un état de pleine conscience ou l’on devient parfaitement maître de ses mouvements. L’esprit est clair et limpide, une certaine sérénité s’installe, on ne fait plus qu’un avec ce que l’on est, ce qui nous entoure et ce que l’on fait. Le flow est atteignable par la concentration et certaine technique de respiration.
      Voili voulou, mes propos relève plus de mes impressions et de mon expérience que de la science.
      Big up à tous, super article ^^

      • Laurent dit :

        Heu je crois qu’on dit la même chose. Pour moi l’adrénaline est juste un des éléments qui aide à stimuler l’apparition du flow. En plus de la concentration, de la maitrise technique, du niveau du défi, etc …

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