L’entraînement lesté ? C’est à voir

l'entraînement lesté en escalade
L’entraînement dans le geste, lesté, est un vieux serpent de mer de la préparation sportive, remis au goût du jour par notamment les adeptes du crossfit. Constitue-t-il cependant la panacée ? Voici quelques explications et pistes à explorer.

Le principe

Il s’agit – tout simplement aurait-on envie de dire – de pratiquer son activité physique en augmentant artificiellement son poids. Cela peut se faire au moyen d’une ceinture de plombs (type plongée), d’un gilet lesté, d’un sac à dos lesté ou plus rarement (pour des questions de coût) d’une combinaison lestée.

En règle générale, les charges préconisées se situent entre 2 et 10 % du poids de corps.

Les avantages supposés

Le postulat des adeptes de cette forme d’entraînement est qu’elle permet de solliciter les muscles exactement comme ils interviennent dans notre spécialité, donc d’une façon ultra spécifique. Cela permettrait donc de résoudre le problème, délicat s’il en est, du transfert des progrès musculaires obtenus par des exercices généraux ou orientés (en salle de musculation par exemple) à l’escalade.

L’entraînement dans le geste, lesté, permettrait aussi de « duper »  le système neuro-musculaire puis de profiter de l’effet de contraste perçu lorsqu’on retire la surcharge et de gagner en efficacité.

Les inconvénients

La principale limite découle du système même de la surcharge : quelle que soit la méthode utilisée (même une combinaison), il va survenir un déplacement du centre de gravité (par exemple, le port d’un gilet lesté va alourdir le tronc par rapport aux autres parties du corps). Et cela va avoir des conséquences sur la gestuelle.

À l’extrême, si la surcharge est placée sur les extrémités des segments (comme on peut parfois le voir chez des coureurs à pied ou des boxeurs), le poids additionnel modifie tellement les paramètres naturels des leviers et moments d’inertie des segments qu’il conduit  à des blessures.

Le mieux est souvent l’ennemi du bien : grimper lesté occasionne une sur-sollicitation des doigts qu’il convient de bien contrôler.

3 jeux pour passer à la pratique

Pour nous grimpeurs, le travail en surcharge peut tout de même se concevoir lors d’exercices orientés, ou même sur mur ou falaise, à condition de respecter certaines conditions.

Gainage orienté sur le pan

L’exercice consiste à se placer sur deux prises (une pour le pied gauche, l’autre pour la main droite), relativement éloignées l’une de l’autre. La prise pour le pied doit être petite ou fuyante. La prise de main pas trop franche, orientée plutôt en épaule.

Après vous être mis en position, faites comme si vous vouliez atteindre une prise éloignée avec la main gauche et maintenez la position le plus longtemps possible.

Si l’exercice est trop facile, c’est à dire si vous tenez plus de 30 secondes, vous pouvez, soit éloigner les prises, soit les rendre moins bonnes, soit garder les mêmes prises mais vous lester au niveau du bassin.

Notre suggestion : Faites 5 gainages de durée max par côté (pas forcément sur les mêmes prises), en changeant de côté lors de chacune des répétitions (un coup à gauche, un coup à droite, etc.) à chaque fois et en prenant comme temps de récupération la durée de l’effort précédent. Prenez 10 minutes de repos et recommencez une fois.

Blocage bras sur barre

Cet exercice peut se faire sur un ou deux bras, en fonction de vos capacités actuelles. Faites des blocages à différents angles (0°, 90°, 120°) en tenant le plus longtemps possible. Si vous êtes capables de bloquer plus de 15 à 20 secondes, alors, dans le but de gagner de la force, il faut intensifier l’exercice : essayez à un bras (si vous étiez sur deux), ou alors lestez-vous au moyen d’une ceinture ou en tenant une haltère. Il s’agit alors de trouver une charge qui ne vous permet pas de tenir plus de 10 secondes.

Notre suggestion :  Après vous être échauffé, faites 3 blocages par bras et par angle en prenant chaque fois 4 minutes de récupération.

Tenue des pieds en dévers

Grimper en étant lesté peut s’envisager de manière ponctuelle, lors de séquences plus axées sur la prise de conscience du travail musculaire que sur le renforcement à proprement parler : par exemple pour améliorer la pose des pieds dans du dévers ou en toit. Mais la priorité est toujours de conserver la qualité gestuelle.

Notre suggestion : Grimpez dans une voie déversante, où les prises de pieds sont peu faciles, en lestant très légèrement les chevilles au moyen de bracelets (500 gr à 1 kg par cheville). Faites une fois la voie avec les bracelets lestés. Puis refaites là à poids normal. L’objectif est de ressentir, de localiser les actions musculaires qui permettent de maintenir les pieds sur les prises (chaînes postérieures de la jambe, fessiers), afin de gagner en efficacité.

Vous aimerez aussi...

6 réponses

  1. et le gilet lesté tu en penses quoi?

    • Olivier dit :

      Salut fred
      sur le principe, je ne suis pas contre. Son utilisation doit se faire en toute conscience que la sollicitation des doigts sera plus grande : attention donc aux arrivées sur les prises un peu vite ou « de travers », lors desquelles on risque d’agir avec les doigts mal placés.

  2. Jo dit :

    Bonjour il y en a pas mal qui parlent ee cette règle de ne pas dépasser les 10% du poids du corps. Pourquoi? ?..

    • Olivier dit :

      Bonjour. Une des difficultés majeures de l’entraînement lesté dans le geste est que le lest lui même et son positionnement sur le corps vont entraîner des perturbations des coordinations motrices. Ainsi, même pour des appareillages sophistiqués (combinaisons lestées répartissant la surcharge « au mieux » sur tout le corps), les conséquences sur la motricité (la précision motrice) apparaissent trop importantes lorsque la surcharge dépasse 10% du poids du sujet.

  3. Adrien dit :

    Bonjour,
    Enfin un article avec des renseignements utiles!
    3 questions pour ma part:
    Pouvez-vous m’indiquer où trouver des combinaisons lestées? Pas une veste, mais un vêtement qui réparti vraiment le poids sur l’ensemble du corps. Après quelques recherches il semble que les magasins classiques n’en vendent pas du tout!
    Ensuite, quel est votre avis sur le fait de porter cette même combinaison dans la vie de tout les jours, c’est à dire l’enfiler après la douche du matin et l’enlever à l’heure du coucher?
    Enfin, peut-on envisager d’ajouter à cette combinaison, qui souvent couvre torse+bras+jambes d’après quelques images, des lestes aux chevilles et aux poignets?
    Merci pour votre attention!

    • Olivier dit :

      bonjour. Merci pour votre commentaire. Alors les réponses seront parcellaires, dsl :-/ :
      – Les combinaisons lestées sont difficilement trouvables. Les volleyeurs pro de Chaumont en ont utilisé à un moment donné ; il y a des expériences qui ont été menées il y a longtemps en ski alpin (dans ce cas précis c’était du bricolage, à partir de masselottes insérées dans des pochettes cousues sur les combis). Nous sommes partis à la chasse pour connaître la provenance des combis lestés des volleyeurs, sans succès pour l’instant.
      – Si vous vous lestez toute la journée, l’effet éventuel du poids supplémentaire se fera sur les muscles de la statique (par exemple les muscles des jambes, les mollets si vous restez souvent debout), les muscles para vertébraux, etc. Cela constituera aussi une surcharge articulaire (chevilles, genoux, bassin, vertèbres). À voir si cela est vraiment nécessaire… Pas sûr du tout !
      – Le fait d’ajouter des lests spécifiquement aux extrémités peut se révéler avoir des effets pervers, car cela va avoir pour conséquence de modifier l’emplacement du centre de gravité desdits segments et donc leurs propriétés d’inertie, et donc des coordinations musculaires. En outre, pour ce qui concerne l’escalade, l’intérêt de rajouter du poids au bout des bras est loin d’être évident : ce n’est pas le fait de pouvoir lever les bras qui est limitant ; pour les jambes c’est autre chose, et il est vrai que d’ajouter des masselottes au niveau des chevilles peut être à un moment donné intéressant.
      Au final, pour ces raisons (et aussi pour des raisons pratiques) c’est pour cela que ce que l’on trouve le plus fréquemment, ce sont des gilets lestés qui placent la surcharge le plus près possible du centre de gravité de l’athlète et modifient donc peu la gestuelle.
      Bon training 🙂

  1. 20 février 2018

    […] exemple à la musculation en excentrique, si elle est mal dosée, au travail lesté pratiqué sans mesure, à la pratique du Pan Güllich à haute dose, sans progressivité. Par ailleurs, des tensions […]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.