Nouvelles technologies : les grandes tendances 2023 en escalade
Les grimpeurs peuvent maintenant bénéficier des nouvelles technologies et même de l’assistance de l’Intelligence Artificielle. Du suivi des performances à la réalité virtuelle en passant par l’optimisation de la gestion des salles : l’escalade se digitalise, se modernise. Dans quelle mesure les grimpeurs en profitent-ils ? La Fabrique verticale vous présente les principales tendances pour l’escalade en salle en 2023.
Les autobelays permettront bientôt l’escalade en tête
Dernière innovation dans le domaine des enrouleurs : les autobelays sont maintenant capables d’assurer un grimpeur qui évolue en tête ! C’est la société italienne Prograde qui propose ce produit. De quoi alimenter les discours réac sur le mode “l’escalade, c’était mieux avant” 😉
Mais une chose est sûre, désormais, les enrouleurs se généralisent. D’ailleurs, la salle Climbing District Saint-Lazare, récemment installée dans une ancienne chapelle, est la 1ere salle au monde uniquement sur auto-enrouleurs. Inimaginable il y a encore quelques années !
Certes, ce que l’escalade perd en convivialité et en partage, elle le gagne en facilité de pratique. Mais exit la relation très forte qui existe dans une cordée et toute cette dimension de responsabilité lorsqu’on assure son partenaire. Puisque l’on a la vie de l’autre en jeu ! Certes maintenant, avec les auto-belays on peut grimper des voies seul, à toutes heures, sans devoir chercher un binôme. Est-ce un progrès ou pas ? L’avenir nous le dira.
En tout cas, les enrouleurs sont de plus en plus aboutis. Le True blue +, par exemple, permet au grimpeur de faire un arrêt dans une voie. Par exemple, pour travailler un mouvement ou une séquence. Ce qui n’était pas possible avant. Et le nouvel enrouleur Prograde est conçu pour assurer un grimpeur qui évolue en tête ! Assez fou. Les nouvelles technologies nous surprendront toujours…
Nouvelles technologies : et la lumière fut !
À La Fabrique verticale, nous vous parlions récemment de la mode des Mooboards et de Kilterboards qui essaiment dans toutes les grandes salles européennes. En effet, c’est un must pour l’entrainement ! Car ces panneaux inclinables et standardisés sont interactifs. Remplis de prises équipées de leds, ils permettent de répertorier et de partager, par le biais d’une application, tous les passages créés sur l’outil. Chacun, via une appli, peut ensuite piocher dans la banque de données. Pas besoin de se prendre la tête à ouvrir.
Dans cette mouvance, plusieurs marques françaises planchent à des solutions du même type, mais en allant un peu plus loin. Par exemple, EP s’est associé à Clift, une entreprise hongroise, pour offrir aux salles un système de prises reliées à des leds. Celles-ci sont adaptables à toutes les structures de la salle, depuis le Spray wall jusqu’aux secteurs de bloc ou aux voies. Car les leds sont compatibles avec tout type de prises ou de volumes. Ainsi, on peut créer des nouveaux parcours, à partir des prises en place, quelque que soit leur positionnement. C’est encore plus versatile que le Kilterboard !
Les leds au service du gaming
Appliqué à l’univers du jeu, la société française Luxov a depuis longtemps flairé l’intérêt qu’on peut retirer de ces systèmes de leds. D’ailleurs, elle a lancé dès 2020 la Gaming board. Il s’agit d’un mur d’escalade compact équipé de prises lumineuses et tactiles, conçu pour les salles d’escalade, les centres de loisirs, les complexes multi- activités, les parcs d’attractions, les centres commerciaux, les hôtels ou les campings.
La visée est moins l’entrainement que la dimension ludique ! Et ça marche. Le mur d’escalade permet aux joueurs d’élaborer des stratégies pour leurs mouvements tout en se défiant les uns les autres par le biais de jeux. Grâce à la technologie TWICE, les prises s’allument et s’animent en fonction des réactions des grimpeurs. Ce qui rend la Gaming board particulièrement fun.
Les salles s’équipent d’applications dédiées
En France, on a vu émerger dans les salles ces dernières années des applications dédiées. Le groupe Climb Up, par exemple, est en train de développer sa propre application. Et déjà en service, il y a aussi Social Boulder, maintenant propriété du réseau Arkose. Cette application permet aux grimpeurs de retrouver sur leur smartphone une sorte de topo interactif de leur salle.
Celui-ci est régulièrement actualisé. Concrètement, les salles doivent payer un abonnement (un peu moins de 100€ par mois) pour avoir accès à l’application. Les nouvelles technologies ont un coût 😉 À noter que d’autres applications du même type existent à l’étranger, elles aussi payantes pour les salles.
Ces applications sont configurées aux spécificités des salles : couleurs utilisées pour le système de cotation, plan de la salle, etc. Les ouvreurs, avec leur smartphone ou une tablette, peuvent alors ajouter au quotidien les blocs dans l’application. Plus des vidéos de démonstration. Pour les grimpeurs, les blocs sont ensuite catégorisés en fonction des facteurs limitants susceptibles de les faire échouer. Par exemple souplesse, équilibre, gainage, etc. Chacun peut aussi rentrer ses réalisations et/ou des vidéos.
Est-ce une avancée ? Difficile à dire. En tout cas, pour les gestionnaires de salle et les ouvreurs, c’est une mine d’infos inestimable. Car cela leur permet de gérer les ouvertures. Ils ont en temps réel une vision claire des blocs les plus appréciés, des zones les plus fréquentées de la salle, du niveau moyen de la clientèle, du temps passé par chacun, des horaires privilégiés…
Bref, à condition que l’application soit largement utilisée par la clientèle (ce qui n’est pas encore vraiment le cas pour l’instant, a priori), tout ceci permet de mieux connaître les utilisateurs pour leur offrir de meilleurs services et améliorer leur expérience. Les esprits chagrin parleront de flicage. Les natures optimistes de nouvelles technologies au service de l’escalade ! À chacun de se faire son opinion 😉
L’IA bientôt au service de l’ouverture ?
Suite à la crise du COVID, plusieurs réseaux de salles en France ont rencontré des difficultés de recrutement, tant le plan de l’encadrement que sur celui de l’ouverture. Car moins d’ouvreurs et de moniteurs ont été formés durant cette période… C’est ce qui explique que la plupart des réseaux ont mis en place des formations d’ouverture en interne. Par ailleurs, ils ont aussi mené des réflexions sur l’IA, en partenariat avec des Grandes écoles, comme HEC, Polytechnique ou les Mines.
L’idée ? Créer une aide à l’ouverture. C’est-à-dire au placement des prises sur le mur. Il serait basé sur l’analyse des blocs antérieurs ouverts dans les salles de ces réseaux, avec un algorithme de machine learning. Cela permettrait de réutiliser d’une salle à l’autre des blocs par définition éphémères. Or ceux-ci pourraient pourtant être proposés à d’autres grimpeurs ailleurs en France. À condition bien sûr de disposer de prises et de profils similaires.
Pour le meilleur ou pour le pire ?
Pour l’instant, ces projets n’en sont encore qu’à leurs balbutiements. Certains auraient été abandonnés, de l’aveu même des dirigeants de certains réseaux. Il faut dire que les contraintes techniques sont nombreuses. Car il faut ajuster tous les paramètres à l’aide d’un jeu de données initiales suffisant. Tout ceci afin que l’algorithme réponde correctement sur d’autres cas similaires par la suite. Cette phase d’ajustement appelée apprentissage est très coûteuse en puissance de calcul. Et elle requiert idéalement un très grand nombre de données… Et c’est bien là le nerf de la guerre !
Dans le domaine de l’escalade, bien sûr, ça pourrait se faire grâce aux données recueillies par les applications de recording développées par les salles, type Social boulder. Car elles pourraient s’appuyer sur toutes les datas glanées au fil du temps dans les salles des différents réseaux utilisant ces applications. Mais sur le plan éthique, cela pose aussi la question de la propriété intellectuelle des blocs créés par les ouvreurs jusqu’à présent. Et n’y a t il pas une forme d’appauvrissement à reproduire toujours les mêmes passages ? Affaire à suivre donc…
Des caméras intelligentes au service de la sécurité
Avec la prévalence croissante des nouvelles technologies dans la vie quotidienne, le groupe Walltopia a pensé que “l’escalade ne devrait pas faire exception. Surtout en matière de sécurité !”. Avec leur filiale Techtopia, ils ont donc lancé le premier système de surveillance en escalade. Ainsi, Higher Eye utilise l’intelligence artificielle. Cette camera intelligente permet de balayer les salles à 360°. Elle aide à détecter les comportements potentiellement dangereux.
On n’est pas loin du panoptisme défini par Michel Foucault dans Surveiller et punir ! Mais force est de constater que dans les installations équipées de systèmes d’auto-assurage, des accidents sont toujours possibles. Car en dépit des triangles placés à la base des enrouleurs et des messages de sécurité, certains grimpeurs, distraits ou inexpérimentés, oublient parfois de s’attacher à l’auto-assureur. Et plusieurs accidents sont arrivés.
Higher Eye s’appuie sur l’IA et intègre une technologie de reconnaissance par image. Le dispositif équipé de caméra IP détecte le mouvement d’un humain s’approchant du mur d’escalade. Il peut suivre et analyser ses actions en observant plusieurs points sur son corps. Il déclenche une alarme si le grimpeur oublie de s’attacher au système d’assurage et dépasse une certaine hauteur. À notre connaissance, aucune salle en France n’est encore équipée de ce système. Sans doute en raison du coût de l’installation.