Analyse du cycle de vie d’un bloc : le Titan d’EP Climbing

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Quel est l’impact environnemental d’un mur de bloc produit en 2023 ? C’est la question que s’est posée le fabricant de prises et de structures d’escalade EP Climbing à propos du Titan. En considérant les panneaux en bois, l’ossature, les macros volumes, les prises et les tapis. Et en s’interrogeant sur la contribution à chaque étape de son cycle de vie (matières premières, production, transport, distribution, utilisation, fin de vie). Passionnant !

Le fabricant français EP Climbing, leader mondial dans l’industrie des Structures Artificielles d’Escalade, a été choisi par l’IFSC et le CIO pour fournir le mur de bloc officiel de Paris 2024. Baptisé Titan, ce fronton de 20 m de large et de 4,5m de haut prendra place sur le site du Bourget. C’est sur cette installation, destinée à permettre la pratique de l’escalade pour une durée de vie de 20 ans, que EP s’est interrogé. Et l’analyse de son cycle de vie, mené par un cabinet de consultants, a permis une estimation des émissions probables et des ressources consommées.

Qu’est-ce que l’analyse du cycle de vie ?

L’analyse de cycle de vie est une méthode permettant de quantifier les impacts d’un produit ou d’un service sur l’environnement. Elle évalue la contribution de chaque étape du cycle de vie. C’est à dire production, distribution, utilisation, fin de vie. L’analyse de cycle de vie prend en compte de divers indicateurs afin d’évaluer les différents impacts comme la contribution au changement climatique, la consommation d’eau ou la participation à l’épuisement des ressources.

Cycle-de-vie

À l’issue de l’étude, on obtient la quantité de carbone émise par kilogramme de matériau produit. Cette méthode d’évaluation normalisée permet donc de réaliser un bilan environnemental. C’est aussi une manière efficace de dégager des pistes d’éco-conception ou d’amélioration du bilan environnemental du système. Il s’agit donc avant tout de poser les bases d’une démarche vertueuse au sein d’une entreprise pour réduire durablement l’impact environnemental de ses produits.

L’analyse du cycle de vie du Titan

Pour mesurer l’impact environnemental et analyser le cycle de vie du Titan, EP Climbing a fait appel à un consultant externe, “Oui/ACT”. Il s’agit d’une entreprise française créée en 2020 et spécialisée dans la stratégie climatique pour les entreprises et les collectivités locales. L’idée ? Intégrer pleinement les défis environnementaux dans la feuille de route d’EP Climbing et construire une stratégie bas-carbone dans le projet du Titan pour Paris 2024.

Pour permettre à EP Climbing une compréhension exhaustive de l’impact de son produit, “Oui/ACT” a réalisé une analyse de cycle de vie comparative (ACV) de différentes configurations de murs de bloc pour comparer leur impact environnemental. Et ainsi identifier des leviers d’action. L’analyse menée par “Oui/ACT” est multi-critères. Elle porte sur l’empreinte carbone. Mais aussi sur l’épuisement des ressources minérales ou la consommation d’eau douce.

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Au total, plusieurs scénarios ont été envisagés. Ils mettent en scène différentes types d’ossature (bois ou acier) et différents types de panneaux. La référence est le panneau en bois CP21 (21 mm d’épaisseur). Il présente deux alternatives, une plus fine, le panneau CP18 (18 mm d’épaisseur).

Pour cette étude, “Oui/ACT” a considéré la présence de 10 macros en polyester et de 20 macros en bois sur le mur de blocs. Plus 240 prises en polyester et 260 prises en polyuréthane, dont la durée de vie est estimée à 2 ans. Enfin, “Oui/ACT” a également intégré à l’étude des tapis en mousse de polyuréthane de faible densité placés sous les blocs pour assurer la sécurité, sur une surface au sol de 114 m2.

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(c) Lena Drapella/IFSC

Les résultats

Au final, le fronton de bloc Titan d’EP Climbing émet l’équivalent de 80 500 kg de CO2 sur l’ensemble de son cycle de vie (20 ans). Pour donner une image plus concrète, cela représente 94 voyages en avion Paris-New York. Ou encore le cycle de vie de 2654 smartphones. En fait, l’empreinte carbone de ce fronton de bloc provient principalement des tapis (56 %) et des matières premières.

En effet, la mousse polyurethane utilisée dans les tapis est très impactante. Et c’est une calamité en termes de recyclage. Dans le scénario envisagé par “Oui/ACT” à l’échelle de 20 ans, les tapis vont être amenés à être remplacés 3 fois. Soit tous les 5 ans. C’est pourquoi EP Climbing travaille d’ores et déjà à la production en France de tapis en mousse recyclée et recyclable. Ils sont actuellement en test chez Arkose. Ils devraient réduire la note salée des tapis dans l’analyse du cycle de vie du Titan.

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L’impact des prises

Après les tapis, viennent ensuite les prises en PU (23%). Puis les prises PE (6%). Les prises en PU sont essentiellement dérivées de la pétrochimie. Elles émettent environ le triple des émissions par rapport au PE. Les prises en polyester sont fabriquées en ajoutant une quantité importante de charge (sable) à leur composition. Ceci réduit considérablement leur impact environnemental. Là encore, pour réduire l’impact environnemental du Titan, EP Climbing a commencé à travailler avec différents fabricants pour des prises recyclées et recyclables. En particulier, Greenholds et depuis peu Ghold. Et avec Volx pour du PE, 100 % made in France.

L’impact sur les ressources minérales et sur l’utilisation de l’eau douce

En outre, l’étude est multi-factorielle. Car “Oui/ACT” s’est aussi intéressé à l’impact du projet Titan sur les ressources minérales et sur l’utilisation de l’eau douce. Là encore, il ressort que les tapis et les prises en PU pèsent lourd dans la balance. Par exemple, dans l’analyse du cycle de vie du Titan, l’impact global en termes d’utilisation des ressources est de 15 202 m3 d’eau douce. Soit 22 piscines olympiques. Ou la consommation annuelle de 1057 français. Et vous savez quoi ? Les tapis sont en cause à hauteur de 58%. Et de 27 % pour les prises en PU.

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Que retenir ?

En fait, cette étude menée par “Oui/ACT” à la demande d’EP Climbing est une première en son genre. À l’heure où les questions écologiques sont plus que jamais d’actualité, elle permet de mettre en évidence les leviers sur lesquels une entreprise peut jouer pour entrer dans une logique de production plus vertueuse. Cette analyse du cycle de vie du Titan, basée sur 4 scénarios dans une perspective comparative, a permis à EP Climbing de disposer d’impact environnementaux quantifiés pour orienter ses choix de conception. Intéressant !

Bien sûr, des analyses avaient déjà été faites dans le milieu de l’escalade. Mais en général elles portaient uniquement sur la structure. Et non l’ensemble (mur+ tapis+ prises). Du coup, avec cette étude, on arrive aujourd’hui à des conclusions beaucoup plus concrètes. Car un mur n’existe pas sans ces éléments supplémentaires. Avec cette analyse du cycle de vie du Titan, EP Climbing a donc souhaité faire un premier état des lieux pour ensuite prendre des décisions à plus long terme.

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Pour l’instant, le fabricant isérois fait déjà plein de petits efforts. Par exemple en supprimant du plastique dans les emballages de prises ou en collaborant avec Ghold  ou Greenholds. Également, on peut noter la mise en place d’un partenariat avec une filière de recyclage de mousse. “Nous allons dans les salles. Nous enlevons la mousse. Ensuite nous envoyons la mousse dans une usine de recyclage spécialisé (en France). Nous avons également des usines certifiées ISO 14001.” Bref, tout un ensemble de pratiques vertueuses !

Vous voulez en savoir plus ? Une conférence aura lieu en Allemagne lors du Salon Vertical Pro, les 24 et 25 novembre prochains

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1 réponse

  1. Zem-climbing dit :

    Merci La Fabrique Verticale pour cet excellent article.
    Cela me conforte dans l’idée que l’option de la prise d’escalade en bois résinée reste à ce jour, si ce n’est la meilleur alternative écologique, un excellent choix pour réduire l’impact environnemental des murs d’escalade.

    Avec la superficie de ce fronton, on peut faire environ 1400 prises en bois résiné du XS au XXL chez Zem-climbing !

    On serait à peu près 6 à 7 fois moins impactant que de la prise PE et 30 fois moins que de la prise PU !

    Reste à faire connaître ces alternatives et à faire changer les habitudes !

    Simon de Zem-climbing

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