Nao Monchois, Mens sana in corpore sano

Nao Monchois escalade

Ils sont une poignée, une dizaine peut-être, les grimpeurs pouvant prétendre au statut de superstars de l’escalade. Pourtant derrière les Adam Ondra, Alex Megos et autres Chris Sharma, nombreux sont ceux qui performent à haut-niveau en falaise ou en compétition, dans un relatif anonymat mais avec une motivation hors norme. Parmi eux, La Fabrique verticale est partie à la rencontre de Nao Monchois. Un grimpeur attachant qui épate par son intelligence et sa simplicité. Portrait.

Après avoir décroché en 2023 le convoité titre de Champion de France Senior, au nez et à la barbe de grimpeurs bien plus capés sur le papier, Nao Monchois poursuit son petit bonhomme de chemin. Un chemin parfois marqué par le doute et les contre-performances, comme lors de cette saison 2024 en Coupe du Monde qu’il qualifie de “compliquée”. Mais un chemin auréolé aussi de belles réalisations en falaise.

Ainsi, l’été dernier, Nao Monchois s’est offert deux “classiques” du Vercors, Sang neuf (9a) et Nice to eat you (8c+), le tout en 5 petits essais à chaque fois. Du plaisir à l’état brut pour ce retour aux affaires en extérieur et au passage, l’occasion d’enrichir sa liste de croix qui comporte déjà une vingtaine de voies entre 8c+ et 9a. Plus un 9a+, La Moustache qui fâche, à Entraygues. Pas mal !

nao monchois grimpe la moustache qui fache 9a+

Un esprit sain dans un corps sain

Mais au-delà des chiffres, c’est surtout la manière dont Nao Monchois concilie études et sport de haut niveau qui a attiré notre attention. Mens sana in corpore sano. Nao Monchois a fait des études d’ingénieur à l’ENSGI Grenoble INP – Génie Industriel, UGA. À l’instar de Paul Jenft, grimpeur chambérien tout récent finaliste à l’épreuve du combiné aux Jeux Olympiques de Paris 2024, qui a suivi lui aussi un cycle préparatoire intégré, à Polytech Grenoble. Les deux grimpeurs sont d’ailleurs colocataires 😉

Certes, ils ne sont pas les seuls à devoir jongler entre les entrainements et les impératifs de la vie étudiante ou professionnelle. Du reste, 9 Sportifs de Haut Niveau sur 10 en France sont des étudiants ou ont une activité professionnelle en parallèle de leur sport. Mais la manière dont le fait Nao est exemplaire. Il vient d’ailleurs d’intégrer une entreprise spécialisée dans l’outdoor pour son stage de fin d’études. Et à terme, il se destine à une carrière dans l’industrie, autour de la chaine logistique (supply chain).

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Nao Monchois : de la chaine de relais à la chaine logistique

“J’ai fait des études d’ingénieur spécialisé en logistique au sein de Grenoble INP, raconte Nao. Nous bénéficions là-bas d’un étalement du cursus ainsi que de nombreuses autres aides comme des heures de soutien, la possibilité de décaler des cours et partiels, des preneurs de notes, une aide financière … C’était une vraie chance. Car sans cela, il m’aurait été impossible de mener de front mes 2 projets sportifs et universitaires”.

Lors de son stage chez un équipementier français du secteur de l’escalade, Nao va travailler sur la migration d’un des modules qui composent le système d’information. Un challenge d’ampleur mené en équipe qui, s’il se passe bien, pourrait peut-être déboucher sur une embauche, qui sait ? “J’ai la chance d’avoir trouvé un stage à temps partiel à 80%. Ce qui me permet de continuer à m’entrainer. Mais effectivement, cela change beaucoup par rapport à cet été, les journées sont bien occupées”, reconnaît Nao.

portrait nao monchois

Et demain ?

C’est une belle manière, en tout cas, de préparer l’avenir, tout en restant dans le monde de l’escalade. Et le signe d’une grande maturité. On sait que préparer la reconversion est une tâche difficile à laquelle sont confrontés nombre d’athlètes de haut-niveau. Bien souvent, ils doivent se débrouiller tout seuls pour imaginer l’après. “Si j’arrive à trouver mon équilibre, je crois que mon idéal de vie pour ces prochaines années serait de travailler en tant qu’ingénieur et de grimper pour moi à côté.”

Pour l’heure, Nao a du mal à se projeter à l’échelle de 10, 20 ou 30 ans. Ce qui est bien naturel quand on a tout juste franchi le cap du quart de siècle. Quand on l’interroge sur la suite, il répond du tac au tac : “Aucune idée, j’ai plein de projets et je saisis les opportunités comme elles arrivent !”. Actuellement, sa motivation le porte vers la falaise où pour la première fois depuis qu’il a commencé l’escalade, il a décidé de s’investir sur un gros projet. Un 9b, Ratstaman vibration, à Céüse ! Le nom a été donné en référence à la musique de Bob Marley et au secteur Face de rat.

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Retour à l’essentiel ?

Au final, Nao semble se réorienter plus franchement sur la falaise, sans pour autant renier ses premières amours et la compétition. “J’ai fait une super saison 2023 et j’avais à cœur de transformer l’essai en m’investissant davantage en 2024, raconte-t-il. J’ai voulu garder la recette de 2023. Mais j’ai appris qu’il ne faut pas s’enliser dans des routines, toujours chercher à les casser pour se réadapter et s’impliquer”.

“J’étais très fort à l’entrainement en début d’année et après 2-3 craquages en compétition, ma confiance en moi et ma motivation ont commencé à s’effriter, je n’avais plus la flamme qui me faisait gagner l’année dernière. J’ai fait une vraie pause cet été pour réfléchir à pourquoi je fais cela et je suis reparti avec une nouvelle organisation, de nouveaux défis pour cette année !”.

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“Je pense qu’il faut faire des choses qui nous font vibrer et travailler une voie dehors à ma limite était un projet que j’avais en tête depuis longtemps”. Nao souhaite garder cela comme fil conducteur et comme marqueur de progression avant de rebasculer en dominante compétition le moment venu, si ça s’avère opportun. Une stratégie qui nous semble très pertinente et également cohérente par rapport à son projet professionnel.

Nao Monchois : une vie en dehors de l’escalade ?

“Avant de commencer l’escalade en salle, raconte Nao, j’ai eu la chance de vivre 4 ans à Tahiti (de 8 à 12 ans) de par le métier de mon papa. Je faisais du surf 4 fois par semaine. Maintenant, c’est mon petit sas de décompression. Tous les ans on part avec une bande d’une dizaine de potes, grimpeurs ou pas, partager de supers moments et se reposer après la saison”.

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Une bonne manière de se vider la tête et d’appréhender les choses avec plus de recul, dans un rapport étroit avec la nature et les éléments. C’est sans doute aussi ce que va chercher Nao en montagne et en alpinisme, une activité qu’il ne pratique pas particulièrement dans une optique de performance. Juste pour le plaisir !

“J’aime de plus en plus ! J’ai fait pas mal de courses cet été et j’adore le fait que tu partages de vrais moments de vie avec tes compagnons de cordée. Il y a beaucoup plus une notion d’équipe par rapport au côté un peu « égoïste » à juste essayer une voie en falaise. Par contre, je suis trop peureux pour faire de l’alpinisme dur. Je trouve qu’assez vite tu prends beaucoup de risques. Et pour l’instant, je ne viendrais pas à cette pratique”.

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Photos coll. Nao Monchois

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