Grossesse, post partum et escalade (2ème partie)
Suite de notre dossier consacré à la reprise de l’escalade après une grossesse. Après le témoignage d’une grimpeuse (Chloé Minoret), voici le point de vue d’un praticien, Jocelyn-William Loubriat, Masseur Kinésithérapeute et rédacteur en chef du site Kinescalade.com. Il revient sur les précautions à prendre pendant la grossesse et après la naissance.
Mon souci de la prévention me force à pondérer certains aspects des éléments énoncés. La première chose, c’est que Chloé n’est pas une grimpeuse lambda. Désolé chères lectrices, vous n’êtes pas toutes des Chloé Minoret ! Un sportif de haut-niveau a une connaissance et une perception de son corps et de ses capacités plus élevée qu’un sportif amateur.
Ceci devra donc être pris en compte lorsqu’il s’agira de décider d’arrêter de grimper en fin de grossesse (ou en milieu) et aussi lorsqu’il s’agira de reprendre. Si Chloé, qui se connait parfaitement, a pu grimper longtemps et reprendre vite, c’est qu’elle a eu la capacité de sentir le moment opportun. C’est aussi que ses capacités physiques de sportive professionnelle lui permettaient de reprendre.
Grimper pendant la grossesse
Durant les trois premiers mois de la grossesse, il est important que l’embryon puisse se fixer convenablement. Ainsi, il est préférable d’éviter les chocs et de trop gros efforts : donc dès le début de la grossesse la grimpe en moulinette me semble plus sage, et ne forcez pas trop la dose. Le bloc et les efforts de gros blocage nécessitant de se mettre en apnée sont à proscrire.
Le deuxième trimestre est celui où vous pourrez peut-être plus en profiter, l’embryon est bien ancré et le ventre encore pas trop gênant. Les derniers mois vous serez peut-être gênée par le ventre et la fatigue. Vous saurez de toute façon quand vous arrêter.
En post partum
Après une grossesse, que l’accouchement se soit fait par voie naturelle ou par césarienne, il est IMPERATIF à mes yeux d’effectuer une rééducation périnéale. Quoi qu’en disent certains médecins : « oh, c’est votre premier enfant, pas besoin… » ou « vous avez eu une césarienne, ce n’est pas nécessaire… ».
La grossesse pèse sur le périnée pendant 9 mois et les modifications hormonales du dernier trimestre ont de grandes conséquences sur l’élasticité des tissus. Ces tissus auront été assouplis pour pouvoir laisser passer un nouveau-né. Qu’il soit passé par là ou pas, il faudra un certain laps de temps pour qu’ils retrouvent leurs caractéristiques initiales. Et là pour le coup, c’est valable que l’on soit sportive de haut niveau ou pas !
Il est donc préconisé de ne pas reprendre durant les 3 mois après l’accouchement. Et il est primordial de s’assurer, auprès d’un professionnel (sage-femme ou kiné spécialisé en rééducation périnéale) que la musculature du périnée est rétablie.
La zone du périnée, d’un point de vue sensoriel, est méconnue. Le travail de rééducation sera peut-être pour certaines un travail d’éducation, de prise de conscience des capacités fonctionnelles de cette zone.
Les risques encourus
Notre activité sportive inflige de grosses contraintes sur les fibres musculaires du périnée. C’est le plancher de ce qu’on appelle le « caisson abdominal ». L’abdomen est un espace fermé en haut par le diaphragme, en avant et sur les côtés par les muscles abdominaux (transverse de l’abdomen, obliques internes et externes et grands droits de l’abdomen), et en bas par le périnée.
Il est rempli par les viscères qui ne sont autres que des masses pleines de liquide ; il s’apparente donc à un caisson hydraulique. À partir du moment où l’on contracte ses abdominaux, on exerce une pression sur l’ensemble des parois, et si l’une est plus faible que les autres elle risque de céder. D’autant que la paroi du périnée comporte des orifices et que cette musculature sert justement à fermer ceux-ci.
Les pressions qui s’exercent dans l’abdomen vers le bas, appuient sur la vessie, l’utérus et le rectum. Si le plancher périnéal venait à être défaillant, ces éléments pourraient être poussés vers la sortie : c’est la “descente d’organes” ou prolapsus. Avant d’en arriver à ce stade, des signes comme des petites fuites urinaires à la toux ou à l’effort se manifesteront.
À retenir
Pour ne pas compromettre votre grossesse, soyez très vigilante les trois premiers mois. Sachez vous écouter le reste de la grossesse. Afin d’éviter de petits désagréments qui pourraient être aggravés par la pratique de votre sport favori et conduire à des troubles lourds de conséquences, ne reprenez l’escalade qu’après l’aval de votre sage-femme ou de votre kiné avec qui vous aurez effectué une rééducation périnéale.
Bonne grimpe à toutes !
À lire pour en savoir plus : Périnée, arrêtons le massacre du Dr Bernadette de Gasquet Edition Marabout
Elle est super la méthode De Gasquet !
Super merci pour ces explications ! 👌