Solenne Piret : “Osez croire en vos rêves !”
Double Championne du Monde d’escalade catégorie AU2 (paraclimbing), Solenne Piret est née avec une agénésie qui l’a privée de son avant-bras droit. Née de parents grimpeurs, elle a toujours grimpé à Bleau, où elle a réalisée des performances impressionnantes. Par exemple Onde de choc, 7B bloc. Rencontre avec une grimpeuse inspirante !
Tu es bleausarde dans l’âme et on voit régulièrement tes performances en forêt, assez hallucinantes quand on connaît ton handicap. Est-ce que tu as aussi une pratique de performance en falaise ?
Solenne Piret : Jusqu’à présent ma pratique de performance est très axée bloc, compte tenu de mon emplacement géographique mais aussi de mes envies… Je pense qu’une pratique plus axée performance en falaise viendra plus tard !
Quand tu as pris contact avec les coachs de La Fabrique verticale il y a quelques années, tu souhaitais que nous t’aidions à compenser les déséquilibres musculaires liés à ton handicap. Tu avais aussi pour objectif de faire de la compétition. Tu as ensuite pris ton envol et avec les résultats qu’on connaît ! Avec le recul, quel regard portes-tu sur ton parcours ?
Solenne Piret : C’était en 2017, ça me semble si loin et si proche à la fois! Beaucoup de choses ont changé depuis. J’ai réorganisé ma vie autour de l’escalade, quitté Paris pour m’installer au cœur de la forêt de Fontainebleau, j’ai cherché me dégager plus de temps pour m’entrainer et grimper.
Finalement je ne suis pas parvenue à compenser le déséquilibre musculaire lié à mon handicap. Aussi parce que j’ai découvert que mon agénésie venait avec une atrophie des muscles. Mais j’ai trouvé l’équilibre général dans mon corps et mon esprit. Aujourd’hui ma motivation est autre. Et les résultats des compétitions et mes performances extérieures me servent à faire passer un message simple : « Osez croire en vos rêves! »
En quoi la pratique de la compétition a-t-elle modifié ton rapport à l’escalade elle-même ?
Solenne Piret : En extérieur, il est facile de se trouver des excuses. Par exemple ce bloc ne me convient pas, c’est morpho etc. Surtout avec un handicap. Si je fais de la compétition, c’est pour gagner. Et pour continuer à gagner, il faut s’entrainer. La compétition m’apporte source de motivation pour l’entrainement, mais aussi pour continuer à me dépasser, à ne pas me reposer sur mes acquis, oser voir plus grand, plus loin. C’est également source d’inspiration que de voir tous ces athlètes se dépasser avec chacun leur handicap.
Solenne Piret, quels sont tes principaux objectifs à venir ?
Solenne Piret : Honnêtement, l’un de mes principal objectif est de contribuer à amener plus de visibilité sur le Paraclimbing, pour voir ce sport s’inscrire aux Jeux Paralympiques. Malgré toutes les questions environnementales que l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques questionne, le Sport reste un formidable fédérateur. « Para » dans « paralympique » ou « paraclimbing » veut dire « parallèle ». Et c’est ce message qui est important. Quel que soit notre histoire, notre morphologie, notre milieu, notre nationalité, se dépasser est fait pour tout le monde.
Qu’est-ce qu’il y a à faire, selon toi, pour promouvoir l’escalade dans un public handi ? Est-ce que tu t’investis toi-même, Solenne Piret, en ce sens ?
Solenne Piret : Selon moi, la promotion de l’escalade auprès de personnes ayant un handicap se fera par la médiatisation. C’est très binaire : on a souvent besoin de s’identifier à quelqu’un. Mais on ne peut pas inventer ce mentor ! On va s’identifier à telle ou telle personne parce qu’on a vu des images, des photos ou des reportages. Or, l’escalade est un sport qui de prime abord semble très élitiste : il faut utiliser ses 4 membres.
Plus il y a de médiatisation autour du Paraclimbing, plus on créé de modèles auxquels s’identifier. Parce quand on a 10 ans et qu’il nous manque une jambe, il est plus facile de s’identifier à Lucie Jarrige qu’à Adam Ondra. J’essaie de m’investir dans ce sens, et j’espère pouvoir passer à la vitesse supérieure bientôt.
Le nouvel entraineur de l’Equipe de France est également très moteur et on espère pouvoir apporter plus de visibilité à cette Equipe de France Para !
Tu es maintenant en partenariat avec la marque Scarpa. Avec quel(s) modèle(s) de chaussons grimpes-tu et pourquoi ?
Solenne Piret : Je grimpe essentiellement avec les Dragos et les Furia S. Ce sont des modèles très souples, et j’aime ces sensations très proches du rocher (ou de la résine). Je les trouve particulièrement adaptés à Fontainebleau aussi, où la pose de pied est primordiale et l’adhérence est maître.
Solenne Piret, un dernier mot à ajouter ?
Solenne Piret : Venez participer aux Championnats de France Paraclimbing le 21/22 mai prochain à Troyes !
Photos © Christophe Cazin, Jan Virt et Sytse van Slooten pour l’IFSC