Federica Mingolla, une revenante bien vivante

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Renvoyant dos à dos les aficionados de la compétition sportive et les purs tenants de l’escalade traditionnelle, Federica Mingolla défend la singularité de son parcours. Par nature curieuse, à 29 ans, elle a déjà exploré toutes les facettes de l’activité, depuis la salle de bloc jusqu’à la falaise, pour finalement passer le diplôme de guide. Portrait d’une grimpeuse en pleine renaissance, après son terrible accident.

Quand nous avons rencontré Federica Mingolla en mars dernier, elle rentrait tout juste d’un voyage en Patagonie où, en compagnie de Lise Billon, elle avait grimpé Bizcochuelo (400 m, 7b+) sur El Mocho. La jeune grimpeuse italienne, qui fait partie du Team Salewa, s’était même offert le luxe d’en faire la première ascension en libre, pensant par erreur être dans une variante plus facile, en 6c. Rire franc, elle reconnaît volontiers que sa passion l’entraine parfois sur des chemins peu évidents.

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Avec Lise, le courant est immédiatement passé. Les deux filles, toutes deux guides et aventurières dans l’âme, se sont rencontrées lors du Petzl Roc Trip à Manikia, où elles ont partagées un van pendant une semaine. Partageant la même attirance pour l’esthétique des lignes et une envie commune de repousser leurs limites, elles sont tout de suite devenues amies. Très vite, les voies s’enchainent, dans les Alpes, au Maroc… puis nait le projet de partir en Patagonie.

De retour en forme

Pourtant, tout ceci aurait très bien pu ne jamais avoir lieu… Car il ne s’est écoulé qu’un an et demi depuis son accident, dans Così parlò Zarathustra au Trono di Osiride. Sa tentative dans cette grande voie en trad’ de 230 m, comptant des difficultés flirtant avec le 7c, s’était soldée par une chute de 15 m sur coinceurs et une fracture des deux talons, plus de nombreuses contusions. S’en suivirent plusieurs mois en fauteuil roulant, puis beaucoup de rééducation avant de pouvoir remettre les chaussons. Une mésaventure qu’elle partage avec une autre amie à elle, Eline Le Menestel, elle aussi sponsorisée par la marque Salewa. Et comme elle, elle regrimpe fort.

federica mingolla_bellavista grimpeuse italienne

Depuis l’accident, bien sûr, la peur est parfois encore là, en particulier en falaise. Comme à Céüse, où elle peine à grimper l’esprit totalement dégagé, les longues chutes lui rappelant toujours de mauvais souvenirs. Solaire et combattive, elle a pourtant renoué sans mal avec la performance, cochant des voies jusqu’à 8c et 8c/+ à Oliana, les fameux Fish eye et Mind control, quelques mois seulement après la reprise. Mais le type d’escalade qu’elle préfère pratiquer, c’est le trad’. Et c’est l’un des plus psychologiques qui soit.

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Alors forcément, cela change l’approche. Elle “bétonne” davantage, avance plus concentrée sur les protections. C’est d’ailleurs là où elle excelle et où elle s’est à nouveau illustrée, là encore telle une revenante, pas si longtemps après l’accident. C’était dans Bellavista, sur la face nord de la Cima Ovest de Lavaredo. Une voie ouverte en solitaire par Alexander Huber en 1999 et dont le niveau de difficulté est estimé aux alentours de 8b+/c. “C’est l’une des rares fois de ma vie où j’ai hurlé de joie”. Un cri de résilience, sans nul doute.

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Des débuts prometteurs au métier de guide

Eloignée des paillettes, la jeune guide piémontaise dégage un je-ne-sais-quoi de désinvolture, matinée d’une assurance qui surprend. Petite, elle se rêvait nageuse. Elle a finalement découvert l’escalade sur le tard, à 14 ans. Après une progression éclair et un bref passage en compétition, elle découvre ensuite la falaise. Puis les grandes voies. Puis l’alpinisme. Et tout s’enchaine très vite, jusqu’à se tourner vers la préparation du métier de guide.

Une passion qui la conduit aujourd’hui à accompagner des groupes en ski, de la Georgie à la Norvège. Très consciente de la chance que lui accorde ce métier, de voyager et de travailler, de découvrir de nouveaux lieux, de nouvelles cultures, de nouvelles spécialités culinaires, elle ne s’interroge pas moins sur le futur de cette profession, avec le dérèglement climatique. “Il faudra sans aucun doute nous adapter, avec à l’évidence moins de ski, reconnaît-elle. “Mais aussi plus d’escalade, même si c’est plus bas en altitude…”

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Slow down, Federica Mingolla face à elle-même

“Ces dernières années, on observe de plus en plus souvent des températures élevées, y compris en altitude. Bien sûr, tout ceci ne peut que nous amener à réfléchir, à observer le moment que nous vivons, à nous adapter. Tout change en permanence, de toutes façons”. C’est aussi un constat qui découle de son accident, qui a radicalement changé sa perception de la vie et son approche de la montagne.

“J’ai vraiment apprécié ces moments dans ma famille, quand je ne pouvais plus marcher, raconte Federica Mingolla. C’est assez paradoxal car c’était une période difficile. Mais j’ai senti beaucoup d’amour et beaucoup de soutien. Et je n’ai plus eu envie d’être autant égocentrique. C’est-à-dire aussi centrée sur mes projets en montagne et en escalade. J’ai compris que je n’étais pas seule. Que c’était important de passer du temps avec les siens”. Logiquement, le regard a changé. Il y a moins de projets tout azimuts : “il faut trouver un équilibre entre ses passions et les personnes qu’on aime”.

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Photos coll. Salewa

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