IA et escalade : pour le meilleur ou pour le pire ?

ia et escalade

On a beaucoup parlé d’Intelligence artificielle, à l’occasion du grand sommet qui s’est déroulé à Paris, au Grand Palais, du 6 au 11 février derniers. C’est pourquoi La Fabrique verticale en est venue à s’interroger sur les avancées promises par cette technologie en escalade, en particulier dans le domaine de l’entrainement et dans celui de l’ouverture. Mais l’IA peut-elle vraiment remplacer l’humain ? Et au fond, quel sera l’impact réel sur notre pratique ?

Deux visions du monde se sont affrontées à Paris en février, lors du Sommet organisé autour de l’Intelligence Artificielle. Celle de l’Europe, plaidant pour une IA plus éthique et pour plus de régulation. Et celle des US, appelant à ne pas tuer une industrie en plein essor, pour ne pas dire juteuse. Le mouvement étant lancé, rien n’arrêtera l’IA. Et ses applications sont déjà nombreuses dans nos vies, au delà des chatbots et de l’IA générative. Alors, au fond, pourquoi pas en escalade ?

Intelligence artificielle et entrainement

Comme dans bien d’autres domaines, force est de constater que l’essor de l’IA offre déjà des perspectives inédites pour l’entraînement en escalade. Par exemple, grâce à des capteurs, ou même simplement à partir d’une vidéo, l’IA peut analyser en détail les mouvements d’un grimpeur. Elle identifie alors les points forts et les points faibles de sa gestuelle et de ses trajectoires. C’est ce que propose une start up norvégienne que La Fabrique verticale a rencontré récemment, Belay AI.

analyse gestuelle escalade de bloc par intelligence artificielle

Une aide précieuse pour les grimpeurs de haut-niveau et leurs entraineurs. En tout cas lors de l’apprentissage de coordinations complexes, notamment en bloc. C’est ce que proposent aussi les Allemands de Climbtrack. Parallèlement, plusieurs autres sociétés se sont lancées dans la course, avec des objectifs divers allant de la conception de plans d’entrainement (ClimbFit, AI Climbing Coach) à la simulation de voies en réalité virtuelle (VR Climbing), en passant par l’aide à l’ouverture (Boulder AI).

Très automatisés, ces plans d’entrainement calqués sur d’autres activités semblent pour le moment à des années-lumière de ce que peut concevoir un être humain en terme d’accompagnement et d’empathie, surtout si on considère l’ensemble des compétences et toute l’expertise d’un entraineur en escalade. Idem pour ces blocs conçus par ordinateur sur la base de milliers de photos. Comment retrouver la richesse de ce que peut créer un humain à l’ouverture ? Pour autant, l’IA offre un potentiel considérable. Que ce soit pour transformer la gestion de l’escalade dans les salles ou pour l’entraînement, en particulier dans le recueil et le traitement des données.

Intelligence_artificielle-escalade main de grimpeur

L’IA à La Fabrique verticale

À La Fabrique verticale, nous coachons des grimpeurs depuis une dizaine d’années. Notre conception a toujours été celle d’un service à taille humaine, très personnalisé, basé sur l’échange. Bref du cousu main. Pour autant, le logiciel qui nous permet d’échanger à distance avec nos grimpeurs, Hexfit, intègre, depuis plusieurs années déjà, de l’intelligence artificielle. Et c’est un outil précieux, notamment pour la régulation de la charge et l’incrémentation des programmes.

Au-delà des échanges que nous pouvons avoir régulièrement avec les grimpeurs que nous entrainons (en visio ou par messagerie), l’outil que nous utilisons sur Hexfit participe, dans l’analyse des datas, à l’individualisation de l’entraînement de chaque athlète, en particulier pour détecter des signaux faibles et ainsi prévenir les blessures. Bien sûr, cela ne remplacera jamais la richesse des interactions humaines. Mais c’est un atout de plus à notre service. Sachant qu’on ne peut pas toujours être en présentiel, comme ce qu’on peut faire lors de workshops par exemple.

entrainement en salle bloc coach

Intelligence artificielle et ouverture

L’IA pourrait également être un outil précieux pour les ouvreurs de voies et de blocs. Avec ses capacités sur-puissantes de calcul et d’analyse, comment ne pas imaginer une intelligence artificielle qui ingurgiterait et décortiquerait des milliers de voies et de blocs existants ? Et qui, à partir du recueil de ces données, suggèrerait des mouvements originaux et adaptés à différents niveaux de difficulté. Des projets de recherche explorent déjà la possibilité de générer automatiquement des blocs ou des voies grâce à l’IA. L’idée serait de fournir aux ouvreurs une base de travail qu’ils pourraient ensuite affiner.

L’IA pourrait aussi permettre d’automatiser certaines tâches, comme la création de plans de voies (dans le cadre de la compétition) ou la gestion des stocks de prises (dans le cadre d’une salle privée ou d’un réseau). Les ouvreurs pourraient alors se concentrer sur les ouvertures et non sur des taches subalternes. Et ainsi gagner du temps ! Reste qu’au final, ce seront toujours bien eux qui visseront les prises sur le mur. Travail demandant un engagement physique important et pas toujours reconnu à sa juste valeur…

ouverture de bloc escalade

L’ouverture de voies étant un métier qui demande une grande connaissance des mouvements et des sensations des grimpeurs, il semble difficile de remplacer cet aspect humain par de l’IA. Mais les technologies évoluent très rapidement. Et il est fort probable que dans les années à venir, l’IA jouera un rôle de plus en plus important dans l’ouverture des blocs et des voies, en particulier pour les passages destinés aux débutants. Sachant que la gestion des ouvertures est un défi majeur dans tous les réseaux, dans un marché très concurrentiel, où la qualité des blocs et voies proposés et la fréquence de leur renouvellement peut peser dans la balance pour le choix d’une ou l’autre salle.

L’IA, pour le meilleur et pour le pire ?

Au final, on peut quand même s’interroger sur ces avancées et sur l’impact réel qu’elles auront sur notre pratique. Par ailleurs, on sait que l’IA a un coût environnemental non négligeable. Les datas centers consomment énormément d’énergie. Et l’essor de cette technologie nécessite l’extraction de métaux rares, qui aura un impact environnemental important.

Autant d’éléments qui ne sont pas rassurants et qui conduisent à s’interroger sur l’IA dans son ensemble. Et à ses applications à domaines aussi futiles, au fond, que l’escalade !

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