Escalade : La puissance d’un bon échauffement
Qui n’a jamais entendu cette phrase, assénée parfois par quelque bon grimpeur, voir un entraîneur ( ! ), d’une manière qui ne laisse place à aucune contradiction : « L’échauffement ça ne sert à rien. D’ailleurs, regarde, moi je ne m’échauffe pas. Ça n’a aucune influence sur mes performances et je ne me suis jamais blessé ! » ?…
Intox ou pas, cette affirmation est malheureusement une contre-vérité flagrante. À des degrés divers, l’absence d’échauffement avant une activité physique à intensité maximale nuit à la performance et accroît les risques de blessure. Et ceci est abondamment documenté par la littérature scientifique.
Bien-sûr, le manque d’échauffement a des conséquences variables en fonction de l’âge ou du type d’activité. Bien-sûr, comme n’importe quelle action d’entraînement, un échauffement mal mené peut conduire à une contre-performance.
Mais répétons-le, un échauffement judicieux et bien conduit sera toujours plus efficace que pas d’échauffement du tout !
Échauffement et performance
Pour ne pas faire trop long, nous nous centrerons davantage ici sur des aspects physiologiques ou mécaniques. Mais nous n’ignorons surtout pas les effets psychologiques de l’échauffement. Car c’est une routine qui permet d’entrer « pleinement » dans une séance d’entraînement ou une compétition.
‘’ Pour qui sort du travail et va grimper à la salle, la phase d’échauffement est un sas qui aidera à évacuer les pensées associées au travail pour profiter ensuite au mieux de l’escalade !
Ainsi, au niveau musculaire, l’échauffement permet d’augmenter la température avec plusieurs effets. Tout d’abord, sur le fonctionnement des enzymes : ce sont elles qui catalysent la production d’énergie et pour elles, la température optimale est entre 37° et 38,5°C. Or, les muscles étant situés pour une bonne partie d’entre eux en « périphérie » du corps, leur température au repos est souvent bien inférieure à 37°C, qui est la température de notre noyau. Ensuite, l’augmentation de température va entraîner une diminution de la viscosité musculaire. Ce qui conduit à une optimisation des qualités d’élasticité des muscles : Cela réduit les risques de blessure par déchirement et surtout augmente la capacité de performance, en particulier dans les activités explosives : les muscles pourront restituer l’énergie élastique de façon plus efficace.
Cette diminution de viscosité est en particulier liée à une hydratation supérieure des tissus avec des effets lubrifiant et amortissant. Ceci est valable au niveau musculaire mais aussi et plus largement pour tous les tissus : l’échauffement améliore les espaces de glissements au niveau des fascias et renforce les capacités des cartilages à supporter les contraintes mécaniques liées à l’effort musculaire.
Au niveau neuromusculaire, l’échauffement conduit à l’amélioration de la coordination motrice et des aspects liés à la proprioception, à la perception du corps dans l’espace. Car certains mouvements effectués lors de l’échauffement stimulent la sensibilité des récepteurs proprioceptifs situés dans les muscles et ligaments et articulations.
Autant d’arguments donc pour répéter que l’échauffement influence les performances musculaires, la mobilité et donc doit constituer une partie incompressible de toute séance d’escalade ou de sport en général.
L’échauffement : une routine variable
Un bon échauffement va donc comporter plusieurs phases qui, chacune, contribueront à préparer tous nos systèmes à l’effort.
Mais dire que l’on doit s’échauffer toujours pareil et qu’il n’y a qu’une forme d’échauffement efficace serait une erreur. Car, par exemple, un échauffement qui serait trop poussé pourrait conduire à une augmentation exagérée de la température et donc avoir des effets négatifs sur la performance. Il pourrait provoquer une fatigue musculaire trop grande. il s’agit donc de bien doser la durée et surtout l’intensité de l’échauffement. Et adopter une méthodologie efficace, ce que nous allons voir.
Et en premier lieu, vous devrez vous adapter à différents facteurs :
- Il faut aussi tenir compte de votre âge : plus on avance, plus le temps consacré à cette phase doit se prolonger.
- Les conditions extérieures comptent aussi. Vous n’aurez pas les mêmes besoins selon que vous démarrez votre séance dans une salle surchauffée ou que vous vous êtes dehors, avec des températures inférieures à 10-15°C. Dans ce cas vous aurez besoin de prolonger L’échauffement.
- De même si vous faites une séance le matin tôt, par rapport au soir. Car le moment de la journée influence grandement la performance selon que vous êtes du matin (vous serez alors au top vers la mi-journée), ou du soir (vous serez bien en fin de journée). Donc si vous êtes du soir et que vous devez grimper le matin, il vous faudra alors consacrer plus de temps à la mise en route.
- Et puis bien sûr, le type de séance/d’activité que vous apprêtez à faire a son importance car faire du bloc, de la voie ou alors, tout autre chose, du badminton, ne représente pas du tout la même chose du point de vue des qualités mobilisées : contrôle moteur, équilibre, force, endurance, adresse… Qualités qu’il s’agit d’activer lors de l’échauffement !
Construisez votre échauffement efficace
En pratique, vous devez donc produire de la chaleur (puis la conserver), tout en étant progressif et varier les exercices de sorte à intégrer tous les facteurs de la performance.
Pour ce faire, vous disposez d’outils peu onéreux et efficaces : rouleaux de massage, exerciseurs digitaux, nappes élastiques, éventuellement une poutre de voyage si vous êtes en falaise.
« La production de chaleur la plus efficace passe par des mises en actions musculaires analytiques (muscle par muscle). Ces actions doivent s’envisager avec un minimum d’intensité. Grosso modo on considère qu’un minimum de puissance de 50 w est requis pour permettre cette augmentation de température.
Voici une trame de base que vous pourrez faire varier en fonction de vos besoins du moment :
Étape 1
Réveillez votre mobilité. Mobilisations par régions (nuque, épaules, dos, bassin, chevilles…), auto-massages, étirements légers, mouvements spécifiques (montées de jambes par exemple). Vous pouvez piocher pour cette phase dans différentes techniques. Par exemple, la salutation au soleil est très puissante pour solliciter la flexibilité du tronc, vers l’avant et vers l’arrière. Les auto-massages de la voûte plantaire conditionnent quant à eux l’étirabilité de la chaîne postérieure des membres inférieurs, tout en réveillant les récepteurs des pieds. Cette étape, nous l’avons remarqué, se combine très bien avec l’échauffement des doigts au moyen de pâtes ou autre. Durée de cette étape : ± 10 minutes.
Étape 2
Réactivez votre contrôle moteur. L’objectif est ici de rendre vos appuis, actions musculaires plus qualitatifs. C’est là que les nappes élastiques entrent en jeu. Nous vous avions présenté un certain nombre de mouvements il y a déjà quelques temps dans cette vidéo. Vous pouvez toujours vous en inspirer et compléter au gré de votre imagination. Par exemple, essayez-donc le golf swing sur une jambe. Vous nous en direz des nouvelles ! Durée de cette étape : variable, entre 5 et 10 minutes selon le ressenti.
Étape 3
Entrez dans la phase spécifique. L’intensité augmente un peu. Vous abordez ici des mouvements, déplacements, types d’actions musculaires qui seront privilégiés par la suite : suspensions, tractions, blocages, jetés faciles, pointés de pieds sont autant de mouvements que vous trouverez à réaliser facilement si vous êtes à la salle, et même dehors si le lieu s’y prête (arbres, petit dévers au pied des voies) ou si vous avez une poutre. Bien sûr, rien de mieux que de faire des blocs ou voies faciles pour réviser vos gammes. Pas non plus besoin d’en faire 50 : Si les premières étapes de votre échauffement ont été bien menées, il suffira de quelques passages, d’une ou deux voies de difficulté croissante pour être au top ! Durée : 10 minutes.
Et voilà.
Bonne séance !!
Merci pour cet article !
Je grimpe depuis l’âge de 8 ans et j’ai observé une réelle différence vers les 17 ans.
Avant, je ne m’échauffais quasiment jamais.
Puis à cet âge, mon corps a commencé à me faire comprendre que je martyrisais mes tendons et articulations. Maintenant, c’est un incontournable !