Pourquoi l’escalade est devenue un sport tendance ?
Surfant paradoxalement sur la mode des sports nature, l’escalade est passée en l’espace de quelques années d’un sport de niche à une véritable tendance de fond. Nouvel eldorado des citadins et des entrepreneurs, la salle de bloc a la cote. Comment expliquer un tel engouement ? La Fabrique verticale, qui a traversé les époques avec passion, s’est penchée sur les raisons d’un tel succès. Décryptage.
En 2022, on estime que 3 millions de grimpeurs en France ont pratiqué, au moins une fois, en salle ou en extérieur. C’est 3 fois plus qu’en 2016 où l’on comptabilisait déjà près d’1 million de grimpeurs en France. Le nombre de licenciés s’élève lui à 160 000. “Cela fait une vingtaine d’années que l’on voit des salles d’escalade essaimer un peu partout en France. Mais le phénomène s’est clairement accéléré ces dix dernières années”, constate Virgile Caillet, délégué général de l’Union Sport et Cycle (USC).
L’escalade, un sport tendance : le contexte
À l’approche de Paris 2024, où la Française Oriane Bertone est d’ores et déjà qualifiée, on peut aussi s’interroger sur le rôle de catalyseur des Jeux Olympiques. Les JO de Tokyo 2020 où l’escalade a fait ses débuts en tant que sport olympique (et d’autres événements médiatisés organisés par Redbull par exemple) ont sans doute aussi contribué à accroître la visibilité de l’escalade. Tout comme la publicité ou l’arrivée de célébrités dans ce sport : Jason Momoa, Jared Leto, Kirsten Dunst, François Civil, Harry Styles…
Est-ce cela qui a incité de nombreux novices à s’intéresser à ce sport ? Et à se diriger en masse vers les salles ? Difficile à dire. Loin de ralentir, l’essor des salles d’escalade, en France et dans le Monde, ne lasse pas de surprendre. Mais au fond, est-ce si étonnant que les jeunes millenials, individualistes, connectés et autonomes, plébiscitent le bloc indoor ? En fait, le succès de l’escalade ne se résume pas à une explication définitive. Le phénomène serait plutôt multi-factoriel. Et l’escalade semble être devenue un sport tendance pour plusieurs raisons.
Un accès de plus en plus facile
Une chose est sûre, si l’escalade a connu une croissance significative en popularité ces dernières années, c’est en raison du nombre croissant de salles privées. Aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, c’est l’offre qui crée le public. Car ces salles offrent un environnement secure pour les débutants. On élimine ainsi la barrière de l’accès à des sites en extérieur, plus éloignés et nécessitant surtout une grosse expérience en terme de gestion de la sécurité. Bref, la salle indoor permet à un public plus large de s’initier à l’escalade. C’est devenu un sport de proximité.
Et ce n’est pas un hasard si le format qui rencontre le plus de succès auprès des citadins est la salle de bloc. Privilégiées par les franchises car moins gourmandes en espace et en investissement, les salles de bloc nécessitent également moins de matériel pour les pratiquants. Et moins de technique. C’est pourquoi le marché est en pleine expansion. Partout, dans les grandes villes de France, les salles poussent comme des champignons. Elles revendiquent 10 millions d’entrées annuelles, hors du giron de la fédération. On en compte près de 250 en France actuellement.
Par ailleurs, l’escalade est un sport qui encourage le dépassement de soi. Depuis toujours, les grimpeurs se fixent des objectifs, que ce soit en falaise ou en compétition. En salle, ils peuvent travailler plus facilement leur force, leur agilité et leur résistance mentale pour réaliser de nouveaux blocs. Cette quête personnelle de perfectionnement attire de nombreuses personnes à la recherche de défis. Auparavant, ce public se tournait plus volontiers vers les salles de fitness. Désormais, c’est la salle d’escalade qui aimante les motivations.
La dimension sociale
Il suffit de faire une seule séance dans une salle de bloc urbaine pour constater à quel point l’entraide est au cœur du système. L’escalade est souvent pratiquée en groupe, ce qui en fait une activité sociale par excellence. Les grimpeurs partagent leurs expériences, s’encouragent mutuellement et construisent des relations au sein d’une communauté. Les réseaux sociaux jouent également un rôle, contribuant ainsi à la popularité croissante de l’escalade.
Cerise sur le gâteau, si on peut parfaitement arriver seul à la salle, on le reste rarement très longtemps. Le public reste, certes, majoritairement masculin. Ce sont des urbains aisés. Agés majoritairement de 18 à 35 ans, ils partagent un mode de vie sain et dynamique. Ils viennent à la salle après le travail, grâce aux grandes amplitudes horaires proposées. On est loin des premiers pans dans les caves que l’on a connus dans les années 90. Ou de l’escalade roots en falaise, où tels des “crag rats”, on se déplaçait de spot en spot en camionnette. La vanlife avant que le mot n’existe et que son hashtag fasse florès sur Instagram…
Après tout, est-ce vraiment un mal ? Mais ne faudrait-il pas simplement donner des noms différents à des formes de pratique sous-tendues par des approches et des philosophies apparemment si radicalement opposées ? Ne pourrait-on pas les réconcilier par un lent et patient travail de pédagogie ? Si les grimpeurs historiques qui trainent leurs guêtres en falaise depuis des lustres déplorent parfois que “les bobos-néo-bloqueurs n’ont pas les codes quand ils débarquent en extérieur”, sans doute est-ce parce que les choses vont trop vite… Laissons le temps faire son œuvre.
L’escalade, un sport tendance
On a coutume de dire que ce qui fait la richesse de l’escalade, c’est qu’elle propose une grande variété de disciplines, de la falaise à la salle de bloc, en passant par le trad’, la compétition ou les grandes voies. Cela permet aux grimpeurs, en fonction de leur âge et de leur vécu, de choisir la forme d’escalade qui correspond le mieux à leurs préférences et à leurs compétences.
En combinant tous ces facteurs, et en proposant des lieux de pratique dont le business model est le bien-être (intégrant restauration healthy et de saison, sauna et espaces de coworking…), l’escalade est devenue un sport tendance. Elle attire un large éventail de personnes. Certes, c’est principalement en bloc pour des raisons évidentes d’accessibilité. Mais qu’ils soient à la recherche de défis physiques, d’une communauté sociale ou de l’opportunité de se reconnecter avec la nature, les grimpeurs évoluent. Et ça, c’est plutôt une bonne nouvelle.
Voir aussi Etat des lieux des salles d’escalade en France en 2022
Je dirais qu’il faut de tout pour faire un monde. Transversale pour celui qui pratique avec passion à l’extérieur, objectif ultime pour le citadin aisé étudiant ou cadre, c’est une activité où chacun y trouve son plaisir autour d’un challenge, autour d’une bière ou d’un café à l’issue de la séance. C’est un phénomène social majeur de ces 15 dernières années.
Ne pas oublier la qualification aux JO Paris 2024 de Bassa Mawem !
Et 2020… 😉
Le succès (relatif) olympique français n’a rien à voir.