Que la force de contact soit avec vous !
Imaginez : vous êtes dans votre projet, au dernier repos avant le crux final. Il ne reste plus qu’à serrer deux réglettes infâmes puis jeter et tenir ce maudit plat. Vous êtes concentré(e). Vous montez le pied droit, puis le gauche ; tout va bien ; vous fixez du regard une dernière fois votre cible, prenez votre élan, poussez à fond et… M…e !
Pourtant vous étiez bien sur la prise, pas trop haut ni trop vite. Alors quoi ? Qu’est-ce qui a manqué ? Et bien peut-être de la force de contact.
La force de contact, c’est quoi ?
En mécanique, la force de contact caractérise l’interaction entre les molécules de deux éléments matériels en contact (par exemple un objet posé sur une table). Pour nous, grimpeurs, elle correspond à la capacité de saisir immédiatement une prise lorsqu’on arrive vite dessus.
Quand on attrape une prise, il y a un petit laps de temps, très bref, de l’ordre du dixième de seconde, avant que nos muscles génèrent leur force maximale. Cette phase est appelée montée en force et constitue le temps nécessaire pour que toutes les fibres musculaires synchronisent leur contraction.
La force de contact, c’est la capacité à générer un haut niveau de force le plus vite possible !
Dans le cas d’un jeté ou d’un mouvement dynamique (que l’on va souvent rencontrer dans les crux des voies), cette capacité revêt un caractère critique : on a besoin que la montée en force soit aussi brève que possible pour que, dès que nos doigts entrent en contact avec la prise, ils exercent suffisamment de force pour nous stabiliser.
Alors certes, on est tout de suite tenté de faire le rapprochement avec la force maximale, qui, pour être effective, implique une synchronisation de la contraction de toutes les fibres des muscles sollicités. Il y a cependant une nuance qui découle de la mise en jeu de ce facteur temporel : le principal, quand on se place sur le plan de la force de contact, c’est de contracter vite !
Améliorez votre force de contact
Sur le principe, pour améliorer la force de contact, il va falloir se tourner vers des sollicitations maximales, afin de se confronter à cette situation « d’urgence ».
Le corollaire de ce type d’entraînement « à la limite » est qu’il n’est pas exempt de risques : on est amené à arriver très vite sur les prises et dans ces conditions le contrôle des mouvements n’est pas des plus évidents.
En pratique :
- Il faut l’aborder avec une bonne expérience de grimpeur.
- Comme pour les entraînements qui concernent la force maximale, les situations proposées ci-dessous doivent s’envisager en étant frais, physiquement et mentalement.
- Les sollicitations ont une intensité très haute : elles nécessitent donc une grande concentration, un implication mentale totale pour être pleinement efficaces.
- Pour limiter les risques, il est préférable de commencer sur des prises plutôt volumineuses, plates ou arrondies.
Des repères :
- Une séance de ce type comportera assez peu de répétitions et des temps de repos importants entre les essais.
- Pour le nombre d’essais ou de répétitions, c’est votre niveau d’influx qui est déterminant : dès qu’il commence à diminuer, il vaut mieux passer à autre chose, car cette baisse s’accompagne souvent d’un fléchissement de la vigilance et d’un moins bon contrôle gestuel.
- Pour les récupérations, un minimum de 3 minutes s’impose entre chaque tentative.
3 outils pour travailler la force de contact
La poutre est, à juste titre, emblématique du travail des doigts. Dans la perspective d’améliorer la force de contact, on pourrait envisager d’y effectuer des suspensions maximales (sur des prises que l’on ne peut tenir plus de 5 secondes) en variant les préhensions. Si cette manière de faire peut avoir un impact sur la force maximale de préhension, elle n’aura que peu d’effet sur la force de contact, puisqu’elle n’aborde pas la saisie des prises « au vol » qui pourtant est au cœur du sujet. Une alternative consiste donc à intégrer cette dimension en faisant du no-foot sur des tours de poutre. À réserver cependant aux plus aguerris !
Faire du bloc à votre limite constitue une deuxième solution. Il s’agit de privilégier des passages comportant seulement 1 ou 2 mouvements extrêmes pour vous, plutôt que des blocs de 5 à 8 mouvements qu’on pratique le plus souvent. Et ces mouvements doivent plutôt être dynamiques !
Cette option est très intéressante car spécifique : non seulement vous allez solliciter vos doigts, mais aussi les chaînes musculaires intervenant pour stabiliser le corps, retenir ou encaisser les balans lors de la saisie des prises. Elle est aussi risquée, car le contrôle des mouvements dynamiques impliquant l’ensemble du corps est très difficile, surtout en situation maximale. On joue là sur le fil du rasoir.
Le pan Güllich est considéré par beaucoup comme l’outil idéal pour améliorer la force de contact : on peut aisément quantifier la sollicitation et isoler le travail des doigts. Wolfgang ne s’y était pas trompé. Attention au fait que ce support sollicite énormément les épaules et surtout les coudes. Il n’est pas non plus ultra spécifique, sauf si vous grimpez toujours en no-foot 😉
Un premier exercice consiste à faire des relancés : Vous choisissez un couloir avec des lattes plutôt plates, ou encore mieux, des boules. Au départ, les deux mains sont à la même hauteur. Ensuite, une main reste fixée sur la première latte, l’autre monte latte par latte le plus haut possible. Si cet exercice est bien utile pour travailler le blocage du bras du côté de la main fixe, il est aussi super efficace pour la force de contact : plus on monte plus il devient difficile de capter la prise !
Un deuxième exercice, plus difficile, consiste à faire des montées synchro : il s’agit « tout simplement » de remonter le pan en jetant simultanément les deux mains, soit sur la même latte, soit en décalant les mains.
Et maintenant, à vous de jouer !!
Merci à Entre Prises qui a mis à disposition les lattes Campus Jugs, Edge et Crimps pour la réalisation de cet article