Voler, ça s’apprend : l’apprentissage de la chute en escalade

chute-apprendre-voler-escalade-peur
La peur de la chute est souvent un frein à la progression. Et ce, pour bien des grimpeurs… Pour qu’elle ne gâche pas votre plaisir de grimper, ni votre évolution dans l’activité, il faut savoir s’y attaquer. Et voler régulièrement. La Fabrique verticale vous dit comment s’y prendre pour la vivre le mieux possible.

L’école de vol est souvent une bonne manière d’envisager les choses. C’est-à-dire apprendre à chuter, à voler, en salle, dans des situations bien maîtrisées. Ça consiste à tomber volontairement, d’abord en moulinette, puis en tête. Pour ensuite, et très progressivement, pouvoir banaliser cette chute. Et grimper plus libéré. Que ce soit sur mur ou en extérieur. Vincent Mathieu, BE d’escalade, nous explique comment il procède.

Avant toute chose

Pour voler, toujours garder à l’esprit où se trouve votre corde ! Entre le mur et votre corps, mais jamais derrière la jambe, au risque de vous retourner lors d’une chute et de vous cogner dos et tête (risque de trauma crânien) !

Voler : méthodologie d’apprentissage

Prévenir son assureur
• Penser à quelque chose que l’on apprécie (une part de gâteau, un lieu, une situation, une musique…). Bref tout ce qui peut vous mettre dans une démarche affective positive ou du moins neutre. Chuter avec la peur au ventre ne fera que renforcer l’association de la chute à votre peur
• Laisser les fesses partir en arrière (pour vous éloigner naturellement de la paroi). Et s’assoir dans le baudrier comme lors d’une descente
Ne pas chercher à se rattraper à quoi que ce soit au passage, en particulier à la dégaine (risque de brulure, arrachement digital, luxation de l’épaule)
Ouvrir les yeux et regarder la zone de chute (si le regard est orienté vers le bas, il n’y aura pas de rotation arrière) pour anticiper la zone de réception des pieds (limite le risque d’entorse latérale de la cheville)
• Ne pas se laisser tomber comme un sac à patate… Rester ACTIF

voler-escalade

Voler, oui, mais encore ?

Positionner les mains au niveau des cuisses afin de leur éviter de se placer n’importe où
Poser les pieds à plat (oblige à avoir les jambes à 90° par rapport au buste et évite les entorses de la cheville par hyper flexion quand les jambes sont trop basses). Avec de l’expérience, la pointe de pieds pourra commencer à amortir
Fléchir les jambes pour amortir l’impact et/ou courir en arrière en cas de grande chutes

Toutes ces actions sont nombreuses et complexes à maîtriser. Il est indispensable de scinder ces apprentissages en plusieurs séances afin de stabiliser les acquis et d’y aller étape par étape, sans générer de peurs qui mettront parfois toute une vie pour passer… Il vaut mieux faire une ou deux chutes bien vécues dans une séance que d’en faire trois mal vécues. Visez la qualité de travail.

Focus sur la situation

Lieu de pratique : dalle verticale avec le moins de prises saillantes possible, puis dalle positive quand la posture est maîtrisée. Fini l’apprentissage en dévers qui est difficilement accessible sous le 5c/6a et qui n’apprend pas à chuter, mais simplement à se laisser tomber comme un sac à patate… L’objectif est d’apprendre à chuter dans tous les profils. Le dévers est le plus simple puisqu’il n’y a quasiment rein à faire.

apprentissage-vol-escalade-tete

Situation 1 : chute en moulinette

• Monter au 2/3 du mur (suffisamment haut pour être sécuritaire, mais pas trop haut pour limiter les peurs)
• demander à une tierce personne de faire un noeud de huit 1m derrière le système d’assurage. Cela évitera le retour au sol en cas de défaillance. Et cela laisse plus de liberté qu’un contre assureur.
• Le grimpeur (corde tendue devant lui) demande à l’assureur de laisser 10cm de mou, puis quand grimpeur et assureurs sont prêt, il chute. 
C’est le grimpeur qui décide de la hauteur de chute ! Il effectue autant de chutes nécessaires jusqu’à ce qu’il se sente prêt à passer à une plus grande hauteur de chute.
• Et ainsi de suite jusqu’à atteindre 2m de chute, afin de reproduire la hauteur maximale atteinte sur SAE.
Cette situation laisse en moyenne une trentaine de chutes en moulinette pour perfectionner sa posture de chute et fortement diminuer son appréhension.

apprendre-voler-escalade-ecole-vol-peur-chute-moulinette

Situation 2 : chute en tête

La démarche est identique. Autant de répétitions nécessaires avant de sentir que l’on peut passer à l’étape supérieure.
1ere chute à 20 cm sous la dégaine afin rassurer le grimpeur qui va chuter pour la première fois sur des dégaines.
2ème chute au niveau de la dégaine
3ème chute à 10cm au dessus de la dégaine et ainsi de suite jusqu’à chuter au niveau de la dégaine supérieure. (vidéo étape 2)
etc jusqu’à la dégaine suivante (vidéo étape 3)

Et voila, finis les “prends moi sec”. Place à des prestations dans lesquelles vous pouvez exprimer tout votre potentiel et chuter sans regret. Il n’y a plus qu’à toujours grimper jusqu’à la chute (avec un assureur de confiance bien sûr) pour conserver cet apprentissage.

Vincent a grimpé pour la première fois sur la falaise des Gaillands (Chamonix) à l’âge de 12 ans. Le virus ne l’a jamais quitté depuis et ses passions pour l’escalade, l’alpinisme, ski restent intactes, même si le temps lui manque pour continuer à s’entraîner.
Il a participé au circuit des compétitions nationales durant une quinzaine d’année et a fait des études en STAPS (licence STAPS « éducation et motricité », puis entraînement sportif), avant de s’orienter vers son idéal de métier premier : le BE escalade. Il est également ouvreur national et cela fait maintenant une dizaine d’années qu’il enseigne, entraîne et forme des grimpeurs et ouvreurs auprès de différentes structures fédérales, universitaires et privées.

Enregistrer

Vous aimerez aussi...

4 réponses

  1. Linda dit :

    J’ai trouvé cet article super.J’aurai bien aimé le lire avant la mise en pratique! J’ai expérimenté la chute volontaire en tête et ayant gardé les jambes le long du corps je me suis pris le mur avec force et suis ressortie avec de belles contusions 😣

  2. Eva dit :

    merci pour l’article; Je n’avais pas peur de la chute en escalade; Récemment, j’ai fait une chute d’un peu plus de 2 m en raison de l’assureur et depuis j’ai développé cette peur; cette personne disait savoir assurer et il n’en était rien; Heureusement, intuitivement, je ne sentais pas le truc et je suis redescendue de 4m à 2 m par la paroi avant; Par miracle, il y avait le tapis, j’aurais pu m’écraser sur le béton; Depuis, j’ai peur, même avec un auto-assureur; Cela me gâche mon plaisir de grimper, je cherche une solution pour dépasser cette peur; Peut-être l’hypnose?

    • Olivier dit :

      Bonjour Eva.
      Oui une telle mésaventure ne peut que générer du doute. Une première solution pourrait être de grimper – à nouveau – avec un(e) assureur en qui vous avez toute confiance, et qui a pu déjà vous assurer. Vous partirez alors dans les voies avec un doute en moins. et puis, pour vous familiariser à nouveau avec la chute, et avec ce(tte) partenaire, vous vous amusez à prendre quelques très courtes chutes, volontaires, assez haut dans les voies, en demandant de bien dynamiser. Vous reconstruirez ainsi la confiance dans votre partenaire.
      De manière générale, à titre personnel, je ne me fais JAMAIS assurer par quelqu’un que je ne connais pas.

  3. Ariane dit :

    Bonjour,
    je souhaiterais faire l’ecole de vol en escalade, pour travailler sur ma peur du vol en grimpe en tête. Savez vous si cela se fait sur Lyon ?
    Merci par avance

  1. 4 octobre 2017

    […] Vous pouvez le retrouver sur cette page : Article apprentissage de la chute en tête […]

  2. 4 septembre 2018

    […] à chuter (faire l’expérience de la chute dans des situations bien maîtrisées pour pouvoir la vivre sereinement par la suite, quel que soit […]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.